Economie - Fiscalité

Prélèvement à la source

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Le prélèvement à la source (PAS) est le sujet d’actualité de nombreuses discussions à la machine à café. Salariés, retraités, entrepreneurs : tout le monde est concerné.

Alain Perret, dirigeant de Corse Audit Walter Allinial et Président de Walter France

Comment ressentez-vous l’ambiance par rapport au PAS ?

Alain Perret : Les salariés sont inquiets car la plupart ne comprennent pas les règles de calcul. Ils entendent parler d’année blanche et sont convaincus, qu’une fois encore, ils n’en bénéficieront pas. Dans leur esprit, leur salaire net va diminuer, donc leur pouvoir d’achat aussi, alors que le PAS ne fait que remplacer la mensualisation existante.

De nombreux « petits patrons » retardent le moment où ils vont devoir s’en occuper. Les contribuables, en particulier les dirigeants d’entreprise, étudient leur situation fiscale actuelle pour envisager des arbitrages en 2018 ou en 2019.

Face à ces attitudes légèrement caricaturées, l’administration fiscale déroule sa campagne de communication qui, par certains côtés, est plus anxiogène que rassurante. Au milieu, les cabinets comptables s’organisent et mettent leurs logiciels de paie en conformité. Ils sont inquiets, eux aussi, car la responsabilité des calculs et le reversement aux impôts est une obligation supplémentaire que leur délégueront les entreprises.

“ Comme c'est souvent le cas avec les textes fiscaux, lorsque le principe est facile à formuler, le diable se cache dans les détails. ”

Qu’est-ce qui va changer en réalité ?

Le montant de l’impôt est calculé de manière identique avec sa progressivité et son quotient familial. C’est « simplement » le mode de recouvrement qui change. Mais bien sûr, le passage d’un système à un autre engendre des difficultés dues au changement.

Quand ?

Dès le 1er janvier 2019. Pour atténuer les surprises désagréables, les bulletins de salaire doivent mentionner dès octobre 2018, c’est-à-dire tout de suite, le montant du PAS et des salaires nets à payer avant et après PAS.

Qui ?

Tous les contribuables imposables : salariés, retraités, en maladie ou au chômage mais aussi les commerçants, les artisans, les agriculteurs, les propriétaires fonciers et les dirigeants d’entreprise.

Quoi ?

Tous les revenus, en distinguant ceux versés par des tiers : employeurs, caisses de retraite, caisses de congés payés, organismes de sécurité sociale et de prévoyance ainsi que pôle emploi ; et les autres revenus – loyers immobiliers, résultats déterminés par déclaration (BIC-BNC-BA), rémunérations non salariales – qui feront l’objet d’acomptes prélevés sur le compte bancaire du contribuable. Pas de jaloux, tout le monde y passe, d’autant que les dividendes reçus ont déjà fait l’objet d’une réforme pour instituer un prélèvement forfaitaire unique en 2017.

Comment ?

En effet le principe de la taxation de « revenus contemporains » signifie qu’en 2019, nous paierons l’impôt sur les revenus de 2019 et non sur ceux de 2018 comme habituellement. Les revenus de 2018 ne seront donc pas taxés, d’où la formule simpliste « d’année blanche ».

Mais c’était en oubliant la qualité des fonctionnaires de Bercy qui nous ont concocté une batterie de mesures anti abus ou… anti fraude. En termes simples, les revenus exceptionnels ou les revenus pilotables de 2018 seront taxés.L’augmentation de salaire 2018 « normale » échappera quant à elle à l’impôt.  

Année blanche : quelques exemples non exhaustifs

  • Un salarié qui obtient des primes ou des revenus variables en 2018, prévus par accord antérieur à 2018 et versés habituellement, ne sera pas taxé sur le supplément par rapport à 2017.
  • Un salarié qui quitte l’entreprise en 2018 et reçoit ses indemnités congés payés, son préavis et son indemnité de licenciement légal ne sera pas taxé sur ce supplément par rapport à 2017.
  • En revanche, si des gratifications exceptionnelles ou anticipées sont versées, elles seront taxées.
  • Un dirigeant d’entreprise qui peut modifier les conditions de sa rémunération ou de son résultat ne pourra être exonéré qu’à hauteur du revenu le plus haut des années 2015, 2016 ou 2017. Un décalage sur les revenus 2018 peut être intéressant mais l’administration ne peut l’admettre que si c’est une augmentation pérenne.
  • Un propriétaire foncier se verra proposer un rythme de déduction de ses charges « pilotables » qui peut restreindre l’intérêt d’anticiper des travaux en 2018. Les règles de déductibilité des factures 2018 non encore payées sont modifiées.
  • Un commerçant, un artisan ou un agriculteur sera taxé sur l’excédent de revenus par rapport aux années 2015, 2016 ou 2017.

Pouvez-vous nous réexpliquer les différents taux ?

Ils doivent être choisis et, dans certains cas, subis. Il existe trois taux :

  • le taux du foyer fiscal qui sera appliqué par défaut ;
  • le taux personnalisé pour les deux personnes du foyer (qui peuvent ainsi opter pour une répartition différente entre elles du montant à payer) ;
  • et enfin le taux neutre qui est le taux qui serait applicable à un célibataire pour des revenus identiques.

Pour éviter de communiquer à son employeur son taux réel, un salarié peut choisir le taux neutre, et dans ce cas l’administration prélèvera la différence sur son compte.

Important : c’est uniquement le contribuable sur son espace personnel qui peut exercer ces options. L’employeur n’a aucun pouvoir de modification quand il reçoit le taux transmis par l’administration.

Enfin, tout un système de « Crédit d’impôt de mise en recouvrement », le CIMR, est prévu pour annuler l’imposition dite normale de 2018 et gérer les réductions et crédits d’impôts déductibles.

“ Les « erreurs » peuvent coûter cher. Une simple omission peut entraîner une amende de 5% ”

L’employeur encourt-il des sanctions ?

Oui ! Les « erreurs » peuvent coûter cher. Une simple omission peut entraîner une amende de 5 %. Les sanctions sont graduées, jusqu’à une peine d’emprisonnement de 2 ans et/ou une amende de 3750 euros pour une rétention délibérée de plus d’un mois, car il s’agit d’un délit pénal.

Pour informer au mieux ses adhérents, le MEDEF Corse organise 4 réunions d’information avec des experts sur tout le territoire : Ajaccio, Bastia, Balagne et extrême sud.